Alice n'était pas franchement du genre à chanter mais elle écoutait volontiers quand c'était aux autres de taper la chansonnette. C'était amusant même s'ils ne chantaient pas tous forcément juste. D'ailleurs, cela ne semblait pas être le fort de ce pauvre Clochard. Cela ne l'empêcha pas de se sentir gênée en l'interrompant mais la situation l'inquiétait trop que pour rester muette. Alors, il pourrait lui remonter les bretelles si le besoin lui venait, elle ne lui en voudrait pas une seconde.

« Vous... pensez qu'il a pu... y passer ? Il a tout de même eu le temps de rentrer jusqu'à la Capitale, après tout... » demanda la conseillère qui eut un soudain frisson dans le dos. Cela n'avait rien de réjouissant. Peut-être aurait-elle finalement mieux fait de rester muette et donc dans le vague. Elle le savait, elle allait être capable d'imaginer le pire. C'était toujours la même chose avec elle, après tout. Peut-être n'était-il pas si invincible ce fameux commandant en qui Kougami avait toute confiance.

La suite ne la réjouit pas plus que ça, d'ailleurs. Elle connaissait les risques mais les entendre était toujours une certaine épreuve pour elle. La jeune femme souffla, se frottant les mains pour se réchauffer mais aussi pour se donner un peu de courage avant de se tourner vers le capitaine, faussement souriante.

« Si je m'inquiète ? Je crois que tout le monde s'inquiète, non ? Disons que je misais beaucoup sur le commandant, pour ainsi dire. Le roi m'avait donné une certaine mission. Mais je crois bien que c'est... raté. » elle hocha la tête suite à ça, un peu angoissée, oui.

Alice se posait bien trop de questions et le capitaine n'arrangeait absolument rien, évidemment. Forcément, il avait vérifié les environs du campement, certainement pas la Capitale. Pourquoi avait-elle songé à ça ? Sans doute s'était-elle emmêlé les pinceaux. Il fallait qu'elle reprenne ses esprits, surtout face à ces soldats qui pourraient la croire fort peu sérieuse. Elle souffla, histoire de se calmer avant de reprendre, doucement mais sûrement.

« Veuillez m'excuser. Je mélange tout, je crois. J'espère simplement qu'il trouvera un moyen pour nous rejoindre s'il est encore en vie actuellement. » elle était sincère. Elle s'inquiétait sincèrement pour le commandant au casque, le commandant qui ne se dévoile jamais devant qui que ce soit.

La discussion évoluait entre le capitaine et la conseillère. Ce n'était pas un mauvais bougre, cet homme. Elle était décidément mieux tombée lors de cette mission que lors de sa toute première mission et unique, avant celle-ci, à l'extérieur de la Capitale. La jeune femme se sentait franchement à l'aise. Ce n'était pas un détail non négociable.

« Oh, vous savez, il m'a secrètement et indirectement invitée à découvrir qui se cachait sous ce casque. Je dois découvrir qui est ce fameux commandant Leo, voilà tout. Une simple et bête mission plutôt gentillet. » dit-elle tout sourire.

Alice hocha la tête. Elle était assez d'accord avec le capitaine, encore une fois. Se dire qu'un commandant est capable de beaucoup de choses rassurait énormément la jeune femme. Après tout, cela voulait dire que le commandant était en vie. Il ne pouvait en être autrement, d'ailleurs ! C'est impossible ! Oui, la conseillère cherchait à se rassurer, par tous les moyens. C'était toujours comme ça quand elle s'inquiétait. Heureusement, le capitaine Clochard avait l'art de voir de manière positive. Il savait la rassurer.

« Je vous remercie, capitaine. Je vous remercie de m'avoir rassurée. Il faudrait que je fasse plus confiance aux qualités des soldats choisis par le roi et surtout avec un tel rang. » elle souffla avant de simplement sourire à la remarque de ce fameux Clochard, au sujet du défi. Que pouvait-elle ajouter à ce sujet ? Il était bel et bien parti, pas possible de savoir quoi que ce soit de plus à l'homme sous le casque.

La nuit tombée, il lui fallait trouver une tente et elle traîna la patte. Il prit la carte que lui tendait l'homme avant d'y jeter un œil, posée près d'un nouveau feu allumé pour la nuit et le repas du soir, sans doute.

Kougami était parti de la Capitale, il avait besoin de filer, de s'aérer l'esprit, de pousser le Strike-Freedom à fond et d'hurler un bon coup. Sa petite sœur dormait avec le cloporte, sa petite sœur était en couple avec le cloporte. Pire, sa petite sœur lui avait menti.

La machine fila, longtemps, durant de longues heures, de très longues heures, une journée complète semblait s'être s'écouler quand il retrouva les traces du convoi puis le campement du soir. Le Strike-Freedom le survola en douceur avant de se poser dans un coin.

Le commandant Léo descendit le long du câble. Casque sur la tête.... il était donc de retour, bel et bien vivant.

* Peut-être que j'aurais du rester là bas? Peut-être que j'aurais du parler à Houki? *

Un médecin vint lui demander si il allait bien, il l'envoya promener. Une soldat lui demanda ce qui lui était arrivé... Il annonça qu'il s'était perdu. Il ne pouvait pas dire la vérité de toute façon.

Alice continuait de traîner la patte quand elle entendit du mouvement depuis le centre du campement. Apparemment, quelque chose d'important. Curieuse, la jeune femme se dirigea jusqu'au brouhaha pour y découvrir le commandant pour qui elle s'était inquiétée pendant tout ce temps et au sujet duquel elle avait parlé avec le capitaine Clochard. Le commandant Leo était bel et bien de retour ? Sain et sauf a priori, d'ailleurs. Comment le saluer ? Comment l'accueillir ? Le prendre dans ses bras ? Elle le faisait avec ses proches. Ce serait très étrange.

Elle souffla, le temps de se calmer, de reprendre son sérieux et de se diriger d'autant plus près de ce jeune homme casqué. Une fois fait, elle fit une fausse et exagérée révérence pour jouer le jeu. Elle voulait l'amuser un peu, histoire de détendre l'ambiance dès son retour.

« Soyez le bienvenue, commandant Leo. » une fois fait, elle le tira par le bras pour qu'ils soient en face à face. « Vous allez bien ? Vous n'avez rien ? On s'est tous inquiétés, vous savez... » elle n'allait pas lui dire qu'elle s'était inquiétée en particulier. Ce serait bien... trop gênant !

* C'est quoi cette révérence exagérée? *

Sous son casque, Kougami sourit. Au moins Alice allait bien!

- Merci conseillère.

Il atterri juste en face d'elle sans trop savoir comment.

- Je me suis juste égaré, ne vous en faites pas. Je vais très bien.

* Physiquement en tout cas. *

Comme si il pouvait aller mal physiquement...

- J’espère que mes collègues ont été de bonnes compagnies en mon absence.

Alice était rassurée de savoir le fameux commandant Leo en bonne santé. Décidément, elle s'était vraiment inquiétée pour pas grand-chose. Soupirant, elle se rappela de faire beaucoup plus confiance, dorénavant, aux compétences des gradés de l'armée que dirigeait Kougami. Elle haussa alors les épaules, soufflant une nouvelle fois avant de rigoler doucement. Pour un commandant, s'égarer pouvait paraître surprenant mais au fond, ils étaient loin des territoires connus de la Capitale et entre toutes les forêts et prairies ou autres plaines désertiques, il est possible, même pour les plus aguerris, de se perdre.

« La prochaine fois, prenez-moi avec vous, le roi vous confirmera que j'ai le sens de l'orientation. » il fallait bien détendre l'ambiance, non ? Un peu plus, toujours un peu plus. Oui, la conseillère voulait garder le commandant, ce coup-ci, pour pouvoir percer son fameux secret.

Quand il lui demanda pour la compagnie des autres soldats, la jeune femme sourit en hochant positivement la tête. Si elle avait été maltraitée ou qu'elle avait subi de quelconques remarques vulgaires, cela se verrait depuis longtemps sur son visage. Oui, la jeune Fujioka avait bien du mal à cacher ses sentiments et ressentiments.

« Très courtois. Le capitaine Clochard m'a même rassurée. Il m'a affirmé que vous n'êtes sûrement pas commandant pour rien. Je devrais plus souvent faire confiance aux soldats de la Capitale ! » dit-elle tout sourire.

- Sur terre je veux bien croire en votre sens de l'orientation... mais dans les airs tout est différent. J'y pense, cela veut-il dire que vous voulez faire un tour dans mon cockpit? Madame la conseillère veut un cours de pilotage?

Soldats et médecins s'étaient éloignés et Kougami avait envie d'en rire. A croire que même malgré le casque ils arrivaient à créer cette bulle rien qu'à eux.

- Je suis heureux de l'entendre! Je n'ai pas choisi de bougre pour ce périple.
Ne restons pas planté là, venait.

Il fila près d'un feu un peu à l'écart, histoire d'avoir la paix. Il n'avait pas vraiment envie que tout le monde vienne lui demander comment il s'était perdu.

- Je suis arrivé pile avant la nuit, j'ai eu de la chance.

L'obscurité commençait à s’emparer des lieux quand le capitaine clochard passa par là.

- Commandant, on a monté votre tente par là. Évitez de vous reperdre cette nuit.
- J'éviterais.
- Vous voyez conseillère, il ne fallait pas vous inquiétez!

* Mais c'est dommage qu'il soit revenu avant la nuit, un peu plus et je dormais avec une conseillère, la grande classe! *

Alice en avait presque oublié que le commandant Leo se baladait, pour ainsi dire, en machines mobiles et donc dans les airs et non sur terre comme elle et le reste du convoi. C'était tout de suite moins son fort de s'orienter dans ce genre de situations. Et cela lui rappela également ce qu'elle avait dit à Kougami et qu'il avait répété au commandant ; le fait qu'elle voulait enfin s'entraîner à bord d'une de ces grandes machines. Oui, elle voulait piloter et se sentir toujours plus utile à l'armée et à Kougami surtout.

« Je crois que ça pourrait plutôt bien nous occuper tous les deux, non ? Peut-être que vous éviterez de vous perdre en présence de la conseillère du roi, surtout si vous savez que nous sommes plutôt proches, n'est-ce pas ? » dit-elle tout sourire, un sourire malicieux, un sourire enfantin avant tout. Elle aimait déjà le taquiner comme elle le fait avec ceux qui lui sont vraiment proches.

« Je vous suis. » ils se dirigèrent donc jusqu'au feu. Ils s'installèrent dans un coin plus tranquille. C'était peut-être mieux comme ça. Elle rigola à la remarque du casqué et lui répondit d'un clin d’œil. « Il faut croire que vous n'êtes pas totalement malchanceux. » avoua-t-elle avant de lui tirer la langue. Quand le capitaine passa, elle lui sourit, d'un signe de tête. Par contre, il avouait ouvertement qu'elle s'était énormément inquiétée. Elle aurait pu lui dire de se taire mais c'était trop tard. Elle ne releva pas la remarque plus que ça. « Oui, vous aviez raison, capitaine. » après quoi, elle se reconcentra sur ledit commandant. « Alors ? Vous avez encore envie de parler de choses et d'autres, comme l'autre soir ? »

Alice s'était réjouie à la réponse du commandant Leo. Il était prêt à parler encore longtemps. Ce qui traduisait qu'il n'était pas près de fermer ne serait-ce qu'un œil. C'était encourageant parce que, elle non plus, elle ne comptait pas fermer les yeux pour mieux l'interroger, pour mieux le sonder. Il l'y invitait depuis l'autre nuit, autant dire qu'elle n'allait pas se retenir. Prise dans le jeu, elle sourit, hochant la tête, un nouveau clin d'oeil, s'imaginant tout ce qu'elle pouvait lui poser de questions pour mieux le trahir, pour mieux le reconnaître. Il fallait qu'elle sache qui se cachait derrière ce casque avant de retrouver Kougami. Elle ne voulait pas lui dire qu'elle avait fait chou blanc. Vraiment pas !

« Puisque vous m'y invitez aussi généreusement, je crois que je ne vais pas pouvoir me retenir, commandant. Vous n'aurez qu'à vous en prendre à vous-même ! » dit-elle avant de faire mine de réfléchir à des questions. Pourtant, elle en avait déjà quelques-unes en tête.

« Donc... le roi m'a dit qu'il vous faisait énormément confiance. Il ne le ferait pas sans raison. Qu'avez-vous fait pour lui ou sa famille avant maintenant ? Si ce n'était que vis-à-vis de lui, il n'y accorderait pas une telle importance. Avez-vous fait quelque chose avant de sauver la princesse Houki ? » demanda-t-elle tout en le regardant les yeux posés sur le casque.

- Allez-y allez-y.

Il ne s'attendait certainement pas à ça. Elle m'était tout de suite la barre très haut. Il pencha la tête sur le côté ce qui fit craquer son cou.

- Avant ça... officiellement je n'ai rien fait.

Sous son casque il se retenait pour ne pas rire... Ralalala, c'était dur.

- C'est une confiance gagnée... pas à pas. Ne cherchez pas d'actes particulièrement héroïque.

* Genre abattre Kouji... Ou aller chercher Houki à la Cité. *

- Maintenant que j'y pense! Avant que vous vous endormiez hier, je vous demandez si vous aviez une arme! Alors en avez vous une? Ne vous endormez pas cette fois.

Un peu plus et il aurait tiré la langue...mais avec son casque...dur!

Alors, le commandant qui avait droit à toute la confiance du roi n'avait rien fait avant le sauvetage de la princesse ? Plutôt surprenant, selon Alice. Qu'avait donc su dénicher Kougami chez ce parfait inconnu puisqu'il s'agissait, selon toutes vraisemblances, d'un simple soldat qui n'avait pas franchement fait parler de lui ? La jeune femme devait se retenir pour ne pas lui sauter dessus et lui faire cracher ce qu'il savait, le comment du pourquoi Kougami réagissait de la sorte envers lui. Il fallait vraiment se calmer.

« Une confiance gagnée pas à pas, vous dites. Sachez que Kougami n'est pas du genre à faire confiance à ce point-là et ce même si vous le connaissez depuis toujours. » elle le savait. Il lui faisait confiance, oui, mais ce n'était pas le cas de tous ceux qu'ils connaissaient depuis aussi longtemps qu'elle. « Vous devez avoir fait quelque chose pour le roi ou l'avoir vu en dehors des devoirs militaires. Il attache beaucoup d'intérêt à la personne qui se cache derrière un... casque de l'armée. Il a besoin de quelqu'un qui sait accorder de l'importance à la princesse au-delà de son rang. » oui, il fallait quelqu'un avec qui il pouvait lier suffisamment de liens sincères. Alice en était persuadée.

« Si j'ai une arme ? Je n'en ai pas prise avec moi, je dois l'avouer. Je supposais qu'au pire on m'en donnerait une. Je n'y suis pas franchement habituée. » avoua-t-elle. Peut-être naïve ? Sans aucun doute, même.