Jouer au suicidaire, aucun bien a mourir, probablement vraie, mais lui n'en avait rien à faire. Tout l'XFA était dans le rouge, la plupart des sécurités étaient hors service et l'IA ne parvenait plus a compensé les dommages de la machine. Avec le peu de force qu'il lui restait il activa une ultime fois son geass et s’élança droit sur Shu en utilisant son boost, même si ceux-ci remplirent leurs objectifs, l'instant d’après fut suivie de leur violente explosion du a la surchauffe et aux dommages qu'il avait subis.

C'est avec une rare violence qu'il tenta de mettre a terre Shu de tout son poids et avec la lame de son fusil au bout de son unique bras tenta de frapper frénétiquement la machine de Shu. Pas même un son ne sortait pour autant de la radio de Shu et White, le jeune homme trop faible et incapable de parler.

White soupira, mi-désespérée mi-blasée. Inaho ne prenait même plus la peine de répondre, encore moins d'arrêter de les attaquer, même si ça ne servait clairement à rien. Tout au plus arriverait-il à provoquer quelques dégâts supplémentaires mais clairement pas mortels. D'ailleurs en constatant l'absence de réaction immédiate de Shu, la Codeuse n'attendit pas pour activer une nouvelle fois sa manette afin de contrer le Geass du soldat.

Le MS d'Inaho était endommagé au point de subir quelques explosions, bon sang pauvre machine, elle ne méritait pas ça ! Et Shu ne risquait pas d'arranger les choses, mais bon au moins il ne visait qu'un bras, pas le cockpit.

- En même temps il utilise tout ce qui lui reste, même si c'est stupide et qu'il doit bien savoir qu'il a plus aucune chance. C'est normal. J'en connais un autre comme ça.

Même si le domaine était différent, au final l'attitude était un peu la même, non ? En tout cas White ne pouvait pas fait grand-chose de plus. Elle avait tenté de discuter, ça n'avait amené à rien, et si Inaho ne voulait même pas répondre elle ne risquait pas d'arriver à quoi que ce soit avec lui. Le mieux qu'elle pouvait faire à la limite, c'était de vérifier que Shu n'essayait pas de le tuer, juste de le mettre ko.

La chute du Ms à cette vitesse eut raison de la machine et d'Inaho par la même occasion, les écrans s'éteignirent après avoir affiché de multiple alerte, alerte et rapport d'erreur en tout genre. Les deux jambes complètement hors d'usage à cause des l'explosions des propulseurs et le tir de Shu termina le boulot en séparant le dernier bras du reste de la machine inerte. Inaho lui avait perdu conscience à l'impact, à peine vivant, il souffrait de multiple traumatisme crânien, anémie et probablement quelques autres dommages internes.

Alors que la mort le guettait, que son esprit s’effritait, un son, un écho, et peut être même une flamme de vie semblait subsisté, pourtant si proche, mais également si loin. Forte, mais impuissante, elle l'éveilla. Ces yeux s'entrent ouvris, le parquet du sol était pourrie et troué, la peinture des murs craqueler et le lit sur lequel il était semblait en bien mauvais état. Debout et titubant, plaqué contre le mur, un bras sur les côtes. Il se dirigea vers la seule porte de la pièce, une présence lui pesait, comme une épée de Damoclès qui se balançait au-dessus de sa tête aux cheveux de bataille comme après une vilaine cuite.

Sans surprise, le pauvre MS d'Inaho finit par rendre l'âme, hors d'état de combattre, probablement comme son pilote. Le combat était terminé, il n'y avait plus d'ennemis dans les environs, du moins pour le moment, donc... plus aucune raison de continuer à faire parler les armes.

- Il ne peut plus rien contre toi, tu n'as pas besoin d'en faire davantage. Tu devrais pas plutôt le ramener à la Cité, dans une cellule ou un truc du genre, pour que tes copains militaires l'interrogent ?

Ils sont censés faire ça les soldats, non ? Pas tuer les leurs, plutôt les interroger afin de savoir pourquoi parfois ils pétaient des câbles.

- Donc si de toute façon il finit exécuté, ça serait du gâchis d'avancer la date avant d'avoir eu toutes les informations possibles qu'il détient, non ?

White avait déjà vu Shu en situation délicate, et dans ses souvenirs il évitait autant que possible de tuer à moins d'y être forcé. C'était d'ailleurs ce qu'il avait prétendu vouloir faire après un long échange qu'ils avaient eu sur la question. Apparemment ce n'était plus à l'ordre du jour, mais... était-ce parce que Inaho possédait un Geass ? La Codeuse se rappelait très bien qu'il avait été perturbé par un de ces pouvoirs utilisés sur lui, au point d'aller la menacer elle-même avec un flingue. En était-il arrivé à la nécessité d'oublier toutes ses belles résolutions à cause de ça ?

Peut-être. Mais l'heure n'était pas à jouer à la psychologue, elle n'en aurait pas le temps, Inaho y passerait bien avant de terminer une conversation de ce type. Par contre, si la raison ne suffisait pas, elle pouvait utiliser l'excuse du Geass pour inverser la vapeur.

- Si tu le tues maintenant, on ne saura jamais qui lui a donné son Geass. Donc impossible d'éviter que ces pouvoirs ne se multiplient encore et encore et encore.

L'agument devait être recevable, non ?

Comme White s'en doutait, c'étaient les arguments du Geass qui faisaient mouche. Intéressant, un peu embêtant aussi : qu'est-ce que Shu irait penser s'il savait que techniquement elle pouvait donner ce pouvoir aux gens, et l'avait d'ailleurs déjà fait quelques fois par le passé ? Pour le coup elle manqua de peu de repartir dans des souvenirs très peu agréables mais elle parvint à éviter, ce n'était vraiment pas le moment.

- Parce que t'es capable de décider qui mérite de vivre ou pas ? Je te savais pas si prétentieux.

Ok c'était provoquer dangereusement l'animal, mais en même temps la Codeuse restait égal à elle-même, avec son franc-parler habituel, alors ce n'était pas spécialement étonnant quand on la connaissait. Cela dit, Shu finit par tirer, certes, mais à côté, évitant d'achever Inaho. Et apparemment ça lui coûta un effort considérable. Et l'activation de l'auto-destruction du Fenice... rien que ça.

- Eeeeeeeeet... tu peux l'annuler non ?

Ya toujours une manipulation pour arrêter ce genre de trucs. A moins qu'il ne faille carrément trifouiller dans les circuits, ce que White adorerait faire, mais côté timing ça risquerait d'être assez court, quand bien même elle savait y faire.

L'autodestruction, un terme à la fois très simple et très vague dans l'esprit de White. Elle savait ce que ça voulait dire, mais en même temps elle n'était pas concernée, alors son esprit ne calculait pas vraiment l'ampleur de la chose. Du moins jusqu'à qu'elle voit la quasi panique de Shu alors qu'il lui disait de se pousser, ce qu'elle fit mécaniquement en comprenant subitement la situation. C'est vrai, si elle ne risquait rien, à part un peu de douleur à supporter quelques instants, lui c'était autre chose : il restait une proie de choix pour la grande Faucheuse.

Pour le coup, un début d'angoisse s'installa subitement chez la Codeuse, ce qui n'aiderait en rien, elle le savait parfaitement, mais le savoir n'empêchait rien. Elle prenait conscience qu'en fin de compte ce qu'elle avait répété à Shu risquait d'arriver beaucoup plus vite que prévu. Elle ne pensait pas avoir raison aussi vite, sans même avoir vraiment eu le temps de profiter de quoi que ce soit, ni même le temps de comprendre réellement ce qu'un simple petit "Oui" stupide pouvait entraîner. Sans possibilité de savoir si, réellement, les choses pouvaient être différentes avec Shu, ou ne faire que se répéter, voire empirer. Ne resterait que la souffrance, une fois de plus, et des regrets, comme toujours, en rajoutant une petite nouveauté : le goût âpre de celui qui s'est royalement fait avoir.

Et pouvait-elle y faire quelque chose ? Au final non, pas vraiment. Si White n'avait plus rien à faire avec la mort, elle était bien incapable d'en protéger les autres. Comme tout le monde, ou presque, Shu mourrait. Aujourd'hui, demain, dans une semaine, un mois, un an, un demi-siècle, au final le résultat serait le même. Se rendre compte que ça pouvait être dans les 30 dernières secondes qui restaient ne rendait que plus réelle cette inéluctable conséquence de la vie. En discuter était une chose, se laisser convaincre d'en faire fi une autre, et la constater en situation réelle encore une autre. Ressentir cette peur vivace d'un coup n'était pas du tout du goût de la demoiselle.

Le bruit de la minuterie qui s'arrêtait tira White de ses pensées et de l'immobilité subite qu'elle avait prise instinctivement, tel le lapin pris dans la lumière des projecteurs d'un MS de passage. Elle se rendit compte alors que Shu s'était occupé du problème en traficotant sous le panneau de contrôle et n'était pas forcément dans un meilleur état, mais sans doute pas pour les mêmes raisons.

La Codeuse inspira un bon coup et se passa nerveusement une main dans les cheveux avant de secouer la tête et d'expirer longuement.

- Oublie. Vaut mieux que je descende, t'as pas besoin de moi pour faire tes trucs de soldat. J'vais prendre la jeep pour repartir.

White supposait que Shu devrait sûrement contacter la Cité ou d'autres personnes pour l'aider à ramener les MS éparpillés ici, ainsi qu'Inaho, le psychopathe s'il était toujours en vie, voire le corps d'Inori. Bref dans tous les cas, elle n'avait rien à faire ici, et mieux valait qu'on ne la trouve pas en présence du Brundinet ici, on irait encore l'accuser de tous les maux. Et surtout elle avait méchamment besoin de prendre l'air.

Shu n'était pas stupide - un de des plus grands défauts - et se doutait bien des raisons qui poussaient White à sortir du Fenice, du moins en partie. Lorsqu'il vint l'éteindre, la Codeuse eut un léger sursaut nerveux mais ne se dégagea pas, laissant ces bras faussement protecteurs l'entourer. La chaleur qu'ils procuraient étaient toujours là, réconfortante, attirante, la même qui avait finalement eu raison d'elle - avec la détermination casse-pied du Brundinet. Mais elle était légèrement ternie par cette ombre éternelle qui rôdait autour du pilote et qui disait "D'une seconde à l'autre, il peut disparaître".

White soupira en secouant un peu la tête. Il ne pouvait pas comprendre, et essayer de lui expliquer ne servirait à rien. Ca faisait partie des choses qu'on doit vivre pour les ressentir et savoir réellement ce qu'elles sont. Les mots étaient trop basiques et fades pour retranscrire une chose pareille. Mais ce n'était pas pour autant sa faute.

- Ca va être difficile vu ta profession de casse-cou en chef.

La Codeuse tentait de mettre un poil d'humour dans la situation, sa meilleure défense en général, mais ce n'était qu'à moitié crédible, puisque ça ne reflétait que trop bien la réalité. Cela dit, elle n'y pouvait rien, à moins d'exiger que Shu démissionne, mais d'une part ça ne le sauverait pas des griffes de la mort, d'autre part elle n'irait jamais lui demander un truc pareil. Ca reviendrait à ce qu'il veuille qu'elle arrête de fouiner partout pour récupérer des bouts de MS : hors de question. On n'arrête pas un passionné par le chantage, loin de là. On l'arrête pas tout court.

Shu les rapprocha de la jeep et reçut alors une communication de la Cité, que White écouta d'abord distraitement, puis un peu plus attentivement. Apparemment ça s'était mal passé là-bas aussi et il y avait des disparitions importantes. Adrian ? L'ancien général devenu pilier lui aussi ? Mince... il était sympathique. Les autres noms ne lui disaient rien, mais apparemment ce n'était pas le cas pour Brundinet. Décidément la mort avait vraiment voulu se rappeler à eux aujourd'hui.

- Ca va aller ?

La Codeuse n'était pas stupide non plus, elle voyait bien que toutes ces nouvelles perturbaient Shu - sans compter sa tentative de vengeance sur Inaho - et même si elle avait besoin de souffler seule un instant, elle pouvait bien tenir encore un peu. Ne serait-ce que pour préciser les choses, vu qu'apparemment le pilote dramatisait rapidement la situation. Ok, vu ses réactions habituelles White ne pouvait pas lui en vouloir, c'était logique. Elle avait beaucoup de défauts, dont celui d'être particulièrement butée. Mais il y avait aussi une contrepartie plus positive : quand elle s'engageait dans quelque chose, elle s'y tenait, au moins un minimum pour savoir apprécier correctement ce dont il était question et pouvoir agir en toute connaissance de cause.

- Je compte pas disparaître, j'ai juste besoin de... d'encaisser certaines choses, c'est tout.

L'observant, elle posa une main sur celle de Shu, un geste simple et doux, le mieux qu'elle pouvait faire pour montrer qu'elle comprenait un minimum ce qu'il voulait dire, et peut-être ressentait en partie.

- J'en dis que tu en as bien besoin et que si tu t'ennuies durant ces vacances, je serais pas loin.