Les larmes montent aussi doucement à mes yeux alors que je peux sentir mon frère manquer de s'effondrer contre moi. Moi aussi, j'ai eu peur mais je crois que je ne le réalise pas encore totalement. Et bêtement, malgré ses mots et son geste, je suis heureuse de pouvoir simplement le serrer dans mes bras. Il est revenu et je crois bien que cette donnée est la seule qui compte en cet instant à mon esprit encore chamboulé. A tel point que j'en oublie tout le reste, jusqu'à l'endroit ou nous nous trouvons et les gens qui nous entourent.  

- Sans la gifle la prochaine fois, ce serait pas mal.

Groumpf !...  

Mon regard qui s'était fermé pour caler ma tête au mieux contre mon aîné se rouvre en entendant cette voix qui vient faire s'emballer mon cœur de nouveau. Je sais que j'avais repéré sa machine mais là, il en est sorti alors aussitôt mes yeux le cherchent, partagés entre panique et soulagement. Avant de l'apercevoir et de laisser s'échapper un soupir de soulagement. Mais si ma poigne sur mon frère s'est un peu relâchée, la sienne demeure complètement crispée, me gardant encore contre lui au point que je n'ose pas bouger d'un millimètre. Reed dans un tel état, je n'en reviens toujours pas.

- Ce n'est pas un spectacle! Du balai tout le monde!
Nous sommes tous fatigués... Mais le dragon n'a rien fait alors... On respire et on se calme?

L'amenez plus là... Plus jamais...

Toujours particulièrement secoué, je peux sentir mon frère relevé la tête et se faire violence pour que ses bras finissent par doucement se détacher de ma personne. Ses doigts demeurent encore perdus dans mes cheveux alors que son regard se colle dans celui du Roi. A la fois franc et clair mais restant humide et inquiet. Et sa voix qui est devenue plus instable, comme un peu cassée, fait remonter une boule de culpabilité dans ma gorge. Oui, son état est en partie de ma faute.

C'est pas la place... d'une civile... Conseillère, Ingénieure ou même Reine...
Elle aurait pas du... voir tout ça...

Un nouveau grognement fatigué lui échappe alors qu'il finit par me lâcher pour venir passer sa main sur son visage afin d'en chasser ses larmes avant de venir se perdre dans ses cheveux. Reprendre son souffle demeure difficile mais maintenant que la crise semble passée, il parait réellement exténué. Tout comme Kougami, dont le calme actuel me surprend tout autant. Je ne rêve pas, c'est bien du sang que je peux voir sur ses vêtements. Et si cela fait remonter ma frayeur, je ne bouge pas pour autant, encore un peu secouée à ma façon par tout cela.  

C'est bon, je vous la rends... J'ai encore un rapport à rendre.
Si vos altesses veulent bien mexcuser...

Voir mon frère le visage aussi fermé et le corps aussi tendu m'en serait presque douloureux. Sur le coup, moi qui avait réussi à rester plutôt calme, je commence réellement à me sentir mal également. Et les voir se défier de la sorte ne fait rien pour me rassurer. Alors, c'est aussi ça la guerre ? En venir à voir ceux que l'on aime capable de se déchirer même une fois les combats terminés? Car même si Reed est sur le départ, la tension les entourant reste palpable, presque oppressante à sa manière.    

- Sam va t'accompagner, tu n'as vraiment pas l'air bien. Nous nous verrons demain?
Mouais, c'est ça.
- Venez lieutenant.  
Hum...

Sam vient poser sa main sur l'épaule de mon frère alors que les doigts de Kougami viennent trouver ma main. Si ce contact me parait rassurant pour le coup, je peine à détacher mon regard de la silhouette de mon frère qui disparaît en direction des dortoirs. Mais ça va aller, c'est juste le contre coup. Demain, il ira mieux. En tout cas, je l'espère vraiment.  

- Viens Kalicko. Nous devons nous reposer.

"- Bien sur. Je te suis."

Mais je ne peux m'empêcher de penser que c'est lui qui en a le plus grand besoin; Enfin eux. Tous ceux qui se sont retrouvés en première ligne, au coeur de ces combats. De nouveau, mon regard tombe sur ces tâches de sang qui réveillent mon angoisse. Sur son épaule, cela ne semble pas être le sien mais au col, au niveau du cou, par contre. Un frisson m'échappe alors que les mots restent bloqués. Il a besoin de souffler vu son état, pas que je l’inonde de questions alors j'attendrais. Par contre, mes doigts ne peuvent s'empêcher de venir jouer un peu contre les siens sur le chemin. Comme pour me rassurer aussi.  

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