C’était sa toute première mission à bord d’une machine mobile, son tout nouveau I-Justice, mais la jeune femme ne semblait pas forcément inquiète. Pas plus que ça, en effet. Elle était avant tout heureuse de pouvoir s’y mettre, de pouvoir enfin essayer à son tour et sentir cette liberté, seule. Pas un au revoir à Kougami, pas un dernier baiser, pas même le moindre mot pour le rassurer, pour lui dire que tout irait bien et qu’il n’aurait pas à s’inquiéter. La conseillère n’avait pas encore la force de lui parler, pas même de le regarder ni d’être dans la même pièce que le roi. Il avait été bien trop blessant. D’ailleurs, lui aussi, il avait fui dès qu’il avait dû faire face aux réactions de Lunamaria et Alice. Il n’était pas franchement plus courageux qu’elle.

Alors, forcément, cette mission était une opportunité. Grâce à celle-là, la jeune blonde pourrait se changer les idées, se concentrer sur toute autre chose et pourquoi pas, faire des étincelles à bord de cette machine. Ou alors… peut-être que ça la perturberait un peu ? Hors de question ! « Je ne suis pas trop lente, Tieria ? » S’inquiéta la demoiselle qui devait y aller plus doucement puisqu’elle n’était encore que débutante.

Pas seuls ? Cela n’avait rien d’étonnant, en soi. Ils se rapprochaient doucement mais sûrement des territoires neutres, pour ainsi dire, et donc d’éventuels ennemis, qu’ils soient du compte de la Cité, et donc aussi aventureux qu’eux deux, ou alors des sauvages. Ils avaient bien trouvés d’étranges machines dans ces fameux endroits inconnus de tous ou en tout cas inexploités pour le moment. Haussant les épaules, les mains toujours bien figées sur les manettes de son mobile suit, l’I-Justice, Alice prenait son courage à deux mains. Certes, elle était nouvelle pilote, mais il y avait Tieria à ses côtés. Jamais il ne l’abandonnerait lâchement. Il en était incapable, si la demoiselle se fiait à son intuition mais aussi à son pouvoir d’Innovator.

« Bien, Tieria. » dit-elle simplement. « Malgré tout, ça fait plaisir de découvrir aussi rapidement et facilement un territoire aussi sauvage. » après quoi elle se reprit. « Je suis désolée. Je parle comme une bleue, comme une enfant qui découvre tout. » Elle était gênée, oui.

Oui, elle avait l’air naïf et insouciant à cet instant mais elle le pensait sincèrement. Elle adorait pouvoir admirer de la sorte un tel paysage n’ayant jamais, apparemment, été foulé par les pieds de l’homme, jamais touché par une quelconque ville. À moins que ?

Quelle joie ! Alice eut un frisson dans le dos quand Tieria lui annonça une vérité qu’elle connaissait malheureusement. Pourtant, elle n’était pas près d’abandonner. Non, surtout pas ! Kougami pourrait lui lancer qu’il avait eu raison, que c’était bien trop dangereux pour elle. Non ! Il ne faut pas qu’elle pense à lui, pas maintenant, pas pour le moment et plus avant un bon bout de temps. Si seulement, un jour, elle parvenait à l’excuser. Il n’était plus fiable. Il n’était plus un ami. Il n’était plus que son roi, le roi à qui elle doit obéissance mais rien d’autre. Il s’était moqué d’elle. Alors, c’était peut-être grâce à lui qu’elle pouvait piloter ce mobile suit mais c’était purement militairement parlant. Dans ce cas-là, elle ne remercierait que le roi, le chef de l’armée et non Kougami.

« Nous n’allons pas périr, Tieria. Je ne nous autorise pas à y rester. Cela gonflerait l’ego du roi qui croit tout savoir mieux que quiconque ! » Tiens donc, elle avait déjà eu ce discours autour d’un verre, au bar de l’ami de celui-ci, mais cette fois-là, elle était en compagnie de Rau Le Creuset, un chevalier. Elle haussa à nouveau les épaules, reprenant les manettes avec conviction pour avancer un peu plus rapidement. Si elle n’était pas préparée aux combats, elle n’était pas une poule mouillée. Elle voulait vraiment continuer sur sa lancée, tant qu’elle le peut.